Photo extraite du site officiel de l'exposition

 

Personnages désarticulés, rose chair, inexpressifs, tordus, cauchemardesques, impressionnants, trop impressionnants....Je n'aimais pas Francis Bacon. Ni paysages, ni objets (ou si peu), que des personnages toujours... Caractères humains indiscutablement, mais, faits de moignons ou de raccourcis malvenus. Quel cheminement intérieur tourmenté pour en arriver là ! Cette recherche artistique ne me touchait pas... Avant que toutes mes réticences ne s'effritent lors de la rétrospective estivale 2016 du Forum Grimaldi à Monaco !

Ce fut pour moi une véritable rencontre avec l'Artiste certes tourmenté mais spirituel, malicieux, épicurien, intelligent, désordonné, vivant, humain. Une vraie rencontre avec son approche plastique aussi. Mon regard aurait su évoluer depuis mes premiers contacts avec l’œuvre de Bacon ? En m'approchant de l'Homme descendant les Marches, je vois la justesse et la franchise du trait derrière une recherche concentrant volume et mouvement, engendrant force et fluidité ; je vois la générosité et la netteté de la touche, et une quête du contraste. Des fenêtres aussi, ouvertes sur un passé inquiétant (l'escalier quitte un fond opaque, figuré par un grand carré noir), et le futur : perspective portée par l'un des rares regards de l’œuvre. Puis, prenant du recul, je réalise que les palettes colorées proposées sont concentrées et harmonieuses, les compositions sobres et efficaces, et les êtres qui les peuplent toujours humains, complexes, tourmentés oui, mais finalement moins dérangeants que dans mon souvenir. Je suis touchée par ces boxeurs solitaires dans leurs cages réduites, ces taureaux disparaissant, ces femmes tordues et par l'hommage calme rendu par Bacon à son entourage (Incroyable portrait à la fois distordu et si ressemblant de Michel Leiris).

J'ai grandi, mon regard a su gagner en compassion sur l'humain, en technicité sur l'artiste.  Et je sors de cette exposition happée par une oeuvre qui à la fois me dépasse et me pousse à reprendre (en toute humilité!) mes pinceaux !

Quelle force, quel impact...